Le Quatuor Psophos – Dana Ciocarlie

AntonĂ­n DvorĂĄk
String quartet n°14
Piano quintet n°2

Le Quatuor Psophos, avec
Dana Ciocarlie, piano

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DĂ©tails produit

Quatuor à cordes n°14, opus 105, B. 193

1.Adagio ma non troppo – Allegro appassionato
2.Molto vivace
3.Lento e molto cantabile
4.Allegro ma non tanto

Quintette avec piano n°2, opus 81, B. 155

5.Allegro, ma non tanto
6.Dumka. Andante con moto
7.Scherzo. (Furiant) Molto vivace
8.Finale. Allegro
 

DurĂ©e totale : 74’45
Ingénieur du son : Jean-Marc Laisné.
EnregistrĂ© Ă  l’Auditorium de l’ADAC,
place Nationale, 75013 Paris,
les 5, 6, 7 et 8 juin 2006.
Livret : Nicolas Southon.

AR RE-SE 2006-2

Résumé

AntonĂ­n DvorĂĄk : trĂ©sors d’une vie de BohĂȘme

Avril 1895. AprĂšs deux ans et demi passĂ©s aux États-Unis, AntonĂ­n DvorĂĄk (1841-1905) revient en BohĂȘme. Le sĂ©jour amĂ©ricain du compositeur tchĂšque est l’un des plus fameux Ă©pisodes de sa biographie. C’est dans sa maison new-yorkaise, oĂč il vivait avec son Ă©pouse Anna et deux de leurs enfants, qu’il composa ses Ɠuvres les plus connues : la Symphonie n°9 dite « du Nouveau Monde » (opus 95, B. 178, 1893), et le Quatuor « AmĂ©ricain » n°12 (opus 93, B. 179, 1893). Il faudrait leur adjoindre The American Flag (opus 102, B. 177, 1894), la Suite dite « AmĂ©ricaine » pour piano (opus 98, B. 184, 1894) et le 3e Quintette Ă  cordes, dit « Indien » (opus 97, B. 180, 1893), pour que soit complĂšte la liste des Ɠuvres inspirĂ©es Ă  DvorĂĄk par les traditions musicales et les mythologies afro-amĂ©ricaines ou indiennes. Usage de mĂ©lodies pentatoniques, thĂšmes proches de negro-spirituals, rythmes syncopĂ©s ou rappelant des traditions indiennes, harmonies mineures naturelles, tels sont les Ă©lĂ©ments de couleur locale qui marquent ces piĂšces. Avec les folklores amĂ©ricains ou indiens – comme avec le folklore bohĂ©mien, DvorĂĄk avait pris soin pourtant de rĂ©inventer plus que d’emprunter : « J’ai simplement Ă©crit des thĂšmes personnels, en leur donnant les particularitĂ©s de la musique des Noirs et des Peaux-Rouges », s’expliqua-t-il.

DvorĂĄk avait Ă©tĂ© appelĂ© dans le nouveau monde par Jeannette Thurber, une riche mĂ©lomane qui voulait crĂ©er Ă  New York un Conservatoire digne de celui de Paris, dans lequel elle avait jadis Ă©tudiĂ©. Quelques annĂ©es aprĂšs l’ouverture de son Ă©tablissement, la mĂ©cĂšne voulait placer Ă  sa tĂȘte une personnalitĂ© charismatique et reconnue, souhaitant secrĂštement favoriser l’éclosion d’une Ă©cole nationale de composition. En 1891, elle avait ainsi eu l’idĂ©e de contacter DvorĂĄk, ce compositeur TchĂšque au prestige grandissant, depuis que ses Danses slaves (opus 46, B. 78, 1878) et son Stabat Mater (opus 58, B. 71, 1877) ont Ă©tĂ© cĂ©lĂ©brĂ©s dans l’Europe entiĂšre Ă  la fin des annĂ©es 1870. Non sans hĂ©siter, le compositeur avait rĂ©pondu favorablement au contrat qui lui avait Ă©tĂ© offert. Ce faisant, il relevait le dĂ©fi d’une vie nouvelle, plutĂŽt que de profiter du confort et des succĂšs europĂ©ens qui lui Ă©taient dĂ©jĂ  garantis. Dans les annĂ©es qui suivirent, DvorĂĄk gouverna Ă  New York l’American School of Opera, enseigna la composition, dirigea des concerts, composa de nouvelles Ɠuvres, dĂ©couvrit une tradition musicale qui lui Ă©tait inconnue. Il s’était entourĂ© d’élĂšves talentueux, avait rĂ©ussi par son dynamisme et son talent Ă  sĂ©duire les AmĂ©ricains. Rapidement, l’exil fut couronnĂ© de succĂšs. À tel point qu’aprĂšs avoir honorĂ© son premier contrat, le compositeur en avait signĂ© un deuxiĂšme en avril 1894, qui prĂ©voyait le renouvellement de son engagement jusqu’au printemps 1896. Entre mai et octobre 1894, DvorĂĄk se ressourça dans sa BohĂȘme natale, avant de repartir pour sa nouvelle saison amĂ©ricaine. Mais les auspices semblĂšrent dĂšs lors moins favorables Ă  sa sĂ©rĂ©nitĂ©.

Les contrariĂ©tĂ©s ne cessent en effet de s’accumuler, affectant le moral et la crĂ©ativitĂ© du musicien. AprĂšs avoir reçu de mauvaises nouvelles de son pĂšre, malade, isolĂ© Ă  Velvary, DvorĂĄk apprend ainsi Ă  la fin de l’annĂ©e le dĂ©cĂšs de sa proche amie Marie CervinkovĂĄ-RiegrovĂĄ, auteur des livrets de ses opĂ©ras Dimitri (B. 127, 1882) et JakobĂ­n (Le Jacobin, opus 84, B. 159, 1888). Quelques mois plus tard, il reçoit d’alarmantes nouvelles de sa chĂšre belle-sƓur Josefina. S’ajoutent Ă  cela les soucis causĂ©s par son 2e Concerto pour violoncelle (opus 104, B. 191) encore en gestation, et dont le soliste rĂ©clame la modification de certains passages. Enfin, il devient clair que sa belle-mĂšre est maintenant trop ĂągĂ©e pour assumer la charge de ses quatre petits-enfants restĂ©s au pays. Les DvorĂĄk rentrent Ă  Prague en avril 1895 pour soutenir Josefina. La belle-sƓur de DvorĂĄk, dont il avait Ă©tĂ© Ă©pris avant d’épouser Anna, meurt en mai. Tous ces Ă©vĂ©nements Ă©branlent le musicien : la gloire amĂ©ricaine est bien peu face aux ĂȘtres chers et Ă  l’importance des racines. Il rompt le contrat qui l’attache Ă  Jeannette Thurber ; lui et sa famille ne retourneront pas aux États-Unis. Revenu Ă  VysokĂĄ, il renoue avec un mode de vie plus calme, entre une vie sociale choisie et des balades solitaires sur ses sentiers favoris.

Du Nouveau monde en BohĂȘme, ou le retour Ă  soi

DvorĂĄk n’a rien composĂ© depuis son Concerto pour violoncelle. Il y a bien le dĂ©but d’un quatuor Ă  cordes, esquissĂ© le 25 mars Ă  New York, peu avant son dĂ©part. Le musicien n’y travaille pas pour l’instant, car c’est une toute nouvelle Ɠuvre qui l’occupe, un quatuor Ă©galement, du 11 novembre au 9 dĂ©cembre : ce sera le 13e (opus 106, B. 192). Dans la foulĂ©e, DvorĂĄk reprend finalement les Ă©bauches new-yorkaises. Le 30 dĂ©cembre suivant, elles seront devenues le 14e Quatuor Ă  cordes (opus 105, B. 193). AchevĂ© aprĂšs le 13e Quatuor, le 14e fut donc projetĂ© avant lui – ce qui explique les numĂ©ros d’opus inversĂ©s. Ces Ɠuvres jumelles, toutes deux d’une vraie grandeur conceptuelle, tĂ©moignent de la sĂ©rĂ©nitĂ© et de l’inspiration retrouvĂ©es : « AprĂšs trois ans, nous sommes heureux de pouvoir passer en BohĂȘme les joyeuses fĂȘtes de NoĂ«l, alors qu’il en a Ă©tĂ© autrement l’annĂ©e derniĂšre, en AmĂ©rique, oĂč nous Ă©tions si loin, sĂ©parĂ©s de nos enfants et de nos amis. Mais le Bon Dieu nous a donnĂ© cet instant et voilĂ  pourquoi nous sommes tous tellement heureux. Je suis maintenant appliquĂ© Ă  la tĂąche. Je travaille avec une telle aisance que je n’aurais pu dĂ©sirer davantage », Ă©crit DvorĂĄk Ă  un ami le 23 dĂ©cembre. Et ce n’est sans doute pas un hasard si son retour Ă  la composition, aprĂšs son retour au pays, passe par le genre purificateur du quatuor Ă  cordes. AprĂšs de nombreux tourments, et tandis qu’il n’a pas pris la plume depuis plusieurs mois, DvorĂĄk renoue avec sa crĂ©ativitĂ© par ce qui fait l’essence de l’écriture musicale. On n’insistera pas en effet sur les vertus gĂ©nĂ©ralement reconnues au quatuor, le plus exigeant et le plus sĂ©rieux parmi les genres de la musique occidentale savante, surtout depuis que Beethoven lui a consacrĂ© ses inspirations les plus visionnaires. Lieu privilĂ©giĂ© de l’expĂ©rimentation, le quatuor Ă  cordes peut Ă©galement ĂȘtre le creuset d’une perfection stylistique cherchant davantage la synthĂšse que la nouveautĂ© ; c’est dans cette perspective que se situe DvorĂĄk avec ses 13e et 14e Quatuors. AprĂšs le voyage aux États-Unis, il s’agit en outre de conjurer la couleur amĂ©ricaine dont tĂ©moignait clairement le 12e Quatuor. Dans l’opus 105, rien ne viendra faire obstacle Ă  la pensĂ©e musicale, l’écriture ne sera qu’un mouvement lyrique pur, dĂ©fait, ou presque, de toute anecdote, dĂ©gagĂ© d’autres soucis que celui de conjuguer harmonieusement quatre lignes mĂ©lodiques. Le 14e Quatuor apparaĂźt bien comme un adieu Ă  l’AmĂ©rique : ses bases y furent posĂ©es, mais sa substance musicale jamais ne s’y rĂ©fĂšre. Par la transition qu’il opĂšre entre le Nouveau monde et la BohĂȘme, il est, comme on l’a dit, l’Ɠuvre du retour au pays, mais encore l’Ɠuvre du retour Ă  soi. Symbole qui ne trompe pas, le quatuor est d’ailleurs crĂ©Ă© le 16 avril 1896, jour anniversaire du retour de DvorĂĄk en BohĂȘme, lors d’un concert des Ă©tudiants du Conservatoire de Prague Ă  l’hĂŽtel Platyz. La premiĂšre « officielle », par le cĂ©lĂšbre Quatuor RosĂ©, a lieu Ă  Vienne le 10 novembre 1896. Le 20 dĂ©cembre suivant, l’Ɠuvre est reprise par le Quatuor Dannreuthe Ă  New York, et le 21 janvier 1897 par le trĂšs reconnu Quatuor de BohĂȘme Ă  Prague (au second violon se trouve le compositeur Josef Suk, futur gendre de DvorĂĄk, tandis qu’au violoncelle officie Hanus Wihan, le crĂ©ateur capricieux du Concerto). À peine trois mois plus tard, le protecteur et cher ami Johannes Brahms mourra. Son dĂ©cĂšs marquera la fin d’une Ă©poque, celle qui avait vu les premiers pas et l’ascension de DvorĂĄk, jusqu’à ses grands succĂšs. Dans les sept ans qui lui restent Ă  vivre, le TchĂšque reviendra aux genres qu’il avait cultivĂ©s dans sa jeunesse, l’opĂ©ra et le poĂšme symphonique essentiellement.

Le Quatuor n°14 (opus 105, B. 193)

I. ADAGIO MA NON TROPPO – ALLEGRO APPASSIONATO. Sur un motif sombre et sinueux, les instruments un Ă  un paraissent, du plus grave au plus aigu. Le procĂ©dĂ© imitatif signale la crĂ©ation d’un monde en miniature (jusqu’à 00’23), dans la tonalitĂ© ombreuse de La b mineur : rien moins qu’une introduction lente, section introductive jadis caractĂ©ristique des structures classiques, et jusque dans les symphonies de Schubert ou Berlioz. Instable et tĂątonnant, cet Adagio ma non troppo dĂ©bouche sur l’affirmation du premier thĂšme (1’13), Allegro appassionato. Il n’est autre que la mutation du motif sinueux initial : l’indĂ©cision est devenue dĂ©termination, l’ombre s’est faite clartĂ©. À la pesanteur de l’introduction rĂ©pond la mĂ©lodie qui s’élance, dans le ton officiel de l’Ɠuvre, La b majeur. En complĂ©ment, une seconde incise mĂ©lodique, plus chantante encore, a tĂŽt fait d’apparaĂźtre (1’31) ; on la retrouvera. Ce que nous avons entendu depuis la fin de l’introduction constitue l’exploration de la premiĂšre zone tonale. C’est maintenant l’épisode de transition vers la seconde : un dialogue plus offensif se noue entre le violoncelle et les deux violons (1’47), qui se rĂ©concilient sur le premier thĂšme (1’59), puis reprennent un dialogue apaisĂ© (2’15). S’ouvre alors la seconde zone tonale, au ton de Mi b majeur (dominante du ton principal, comme il se doit) : une cavalcade commence (2’29), soutenue par le violoncelle qui ronfle dans le grave. La mĂ©canique est parfaite, on imagine un guerrier au combat, qui assĂšne ses coups, se retire, revient, puis triomphe (2’55). AprĂšs l’ensemble de cette exposition, un Poco sostenuto e tranquillo (3’11) ouvre le dĂ©veloppement. Celui-ci exploite essentiellement la sinuositĂ© du premier thĂšme, qui a valeur de ligne principale comme d’accompagnement, dans un discours passionnĂ©, emportĂ© par ses doubles-croches perpĂ©tuelles. La mĂ©lodie complĂ©mentaire du premier thĂšme refait surface, et calme le jeu (4’49). Son retour prĂ©maturĂ© vient signaler l’imminence de la rĂ©exposition : le premier thĂšme, presque imperceptible, apparaĂźt en fondu enchaĂźnĂ© (5’22). Comme dans l’exposition, le dialogue entre le violoncelle et les deux violons (5’47) annonce la deuxiĂšme section, prĂ©sentĂ©e non plus en Mi b, mais dans le ton principal de La b (c’est bien la rĂšgle de la rĂ©exposition). La cavalcade (5’58) est aussi admirablement graduĂ©e que la premiĂšre fois. Reste le Meno mosso d’une « Coda » (6’37) pour conjuguer le premier thĂšme avec la mĂ©lodie qui le secondait, avant de lui faire refermer ce premier mouvement avec panache.

II. MOLTO VIVACE. Voici le mouvement rapide du quatuor, de forme traditionnelle : Scherzo/Trio/Scherzo. Le Scherzo s’apparente Ă  un furiant, cette danse populaire tchĂšque que rendent pittoresque ses dĂ©placements d’accents rythmiques. En Fa mineur, un motif rythmique espiĂšgle s’impose d’entrĂ©e de jeu – sa terminaison brutale (0’06, 0’15) devient elle-mĂȘme une thĂ©matique (0’18, 0’31). Dans une Ă©criture foisonnante et bruissante de mille dĂ©tails extraordinairement agencĂ©s, c’est un esprit populaire qui domine, transcendĂ© cependant par une Ă©blouissante maĂźtrise technique – rythmique en particulier. La derniĂšre section du Scherzo reprend son motif principal (1’17). Dans le Trio, plus calme par nature, et situĂ© dans le ton voisin de RĂ© b majeur, DvorĂĄk emprunte Ă  son opĂ©ra JakobĂ­n la berceuse « Ce doux sourire d’enfant ». La mĂ©lodie chaleureuse, soutenue tout au long de la section par de frĂ©missants accords, ne laisse rien filtrer de son origine dramatique. Elle dialogue d’abord avec le violoncelle (1’43), module (2’49), puis se trouve mĂȘme traitĂ©e en canon (3’31). AprĂšs un quasi duo d’amour entre les deux violons, (3’45), une section plus calme (4’27) amĂšne la fin du Trio, qui sonne le retour du Scherzo par le rappel de son motif principal (4’45). Le second Ă©noncĂ© du Scherzo sera identique au premier, simplement grevĂ© de ses barres de reprises.

III. LENTO E MOLTO CANTABILE. En vĂ©ritĂ©, ce mouvement de forme « Lied » (ABA) est davantage fervent et lyrique que vĂ©ritablement calme. TrĂšs classique dans l’agencement de ses phrases, il est cependant menĂ© d’une maniĂšre trĂšs romantique par la gradation efficace de ses Ă©panchements. Un premier thĂšme est donnĂ©, tendre et ample, dĂ©jĂ  enrichi d’une ligne supplĂ©mentaire lors de sa reprise (0’43). Plus tendre encore, un deuxiĂšme thĂšme subit le mĂȘme sort, d’abord donnĂ© distinctement au premier violon (1’26), puis magnifiĂ© par l’ajout d’une nouvelle voix et d’ornements divers lors de sa deuxiĂšme exposition (2’28). On le voit, le procĂ©dĂ© consiste Ă  exacerber l’expressivitĂ© au moyen de rĂ©pĂ©titions et de variations. Dans la partie centrale, plus tĂ©nĂ©breuse, un ostinato du violoncelle (3’49) soutient une inflexion angoissĂ©e aux violons et alto ; l’écriture s’inverse, l’ostinato passant Ă  l’aigu (4’29). EmportĂ© par le chromatisme, le discours se fait plus ardent (4’55), puis s’apaise rapidement. Le retour de la premiĂšre section est au dĂ©but marquĂ© par la prĂ©sence de pizzicati (5’28), mais surtout par les bruissements du second violon. Le dĂ©roulement est sensiblement diffĂ©rent de la premiĂšre prĂ©sentation : un passage en est absent, mais surtout, la richesse de l’ornementation fait atteindre au discours des sommets d’effusion. Une coda (7’38) fait rĂ©apparaĂźtre le motif angoissĂ© de la section centrale, comme un mauvais souvenir qu’efface finalement la sereine progression dans l’aigu du premier violon.

IV. ALLEGRO MA NON TANTO. Le dernier mouvement du quatuor est de loin le plus vaste. Sa complexitĂ© formelle en rendrait laborieuse la description linĂ©aire, mais il faut insister sur quelques-unes de ses particularitĂ©s. D’abord, son Ă©conomie thĂ©matique. Cette page vigoureuse et incroyablement inventive repose en effet sur un unique motif – ou presque, exposĂ© Ă  nu dĂšs l’ouverture, au violoncelle. Au milieu de ses nombreux dĂ©veloppements, il reviendra se signaler, au violon (4’06) ou au violoncelle (4’47), et tendre le discours. Signalons Ă©galement la prĂ©sence d’un chant tranquille (1’53) qui fera son retour transposĂ© vers la fin du mouvement (6’20). Signe que la rhĂ©torique de la forme sonate n’est pas absente de ce mouvement, mĂȘme si les atours vifs et joueurs d’un rondo le dĂ©finissent avant tout : contrastes, relances, fondus enchaĂźnĂ©s des sections, tourbillons de doubles-croches. C’est sous le signe de cette gaĂźtĂ© lumineuse que DvorĂĄk fait ses adieux au quatuor et Ă  la musique de chambre.

Racheter un « péché de jeunesse »

Retour en arriĂšre. On l’a dit, les annĂ©es 1880 sont celles des premiers grands succĂšs de DvorĂĄk. L’Angleterre lui rĂ©serve un accueil spĂ©cialement enthousiaste. Le musicien s’y rend plusieurs fois entre 1884 et 1886, par exemple pour diriger son Stabat Mater (au Royal Albert Hall, devant 12 000 personnes), sa 6e Symphonie (opus 60, B. 112, 1880), son Nocturne pour orchestre Ă  cordes (B. 47, 1882). C’est lĂ  Ă©galement qu’il crĂ©e sa 7e Symphonie (opus 170, B. 141, 1885), son oratorio Sainte Ludmila (opus 71, B. 144, 1886), ou sa cantate Svatebni kosile (Les Chemises de noces, opus 69, B. 135, 1884). Ces tournĂ©es sont profitables, tandis que l’Autriche et l’Allemagne voient d’un mauvais Ɠil le nationalisme musical de DvorĂĄk. D’ailleurs, le compositeur se dĂ©finit lui-mĂȘme comme « un simple musicien tchĂšque, qui entend partout autour de lui de la musique : dans les forĂȘts, dans les champs de blĂ©, dans l’eau des torrents, dans les chansons populaires
 La nature, les rĂ©cits, sont la source de mon inspiration. Faites l’éloge de ma musique, mais le plus important pour moi sera ce qu’on en pense ici, en BohĂȘme ; je serai touchĂ© et heureux si elle y est accueillie avec amour ».

En 1884, le compositeur a fait l’acquisition d’une propriĂ©tĂ© Ă  VysokĂĄ, au sud de Prague. Il y passera dĂ©sormais une partie de l’annĂ©e, du printemps Ă  l’automne, alternant composition et promenades en forĂȘt, devisant avec les paysans de la rĂ©gion ou accueillant ses amis musiciens. L’atmosphĂšre sereine et familiale de ces sĂ©jours en BohĂȘme du Sud est propice, en effet, Ă  l’éclosion d’un rĂ©pertoire de chambre riche et variĂ©. Dans cette production, DvorĂĄk dĂ©voile un visage qu’on lui connaĂźt assez peu encore. Son romantisme bohĂ©mien, partagĂ© jusque-lĂ  entre Brahms et l’école plus moderne de Liszt et Wagner, s’illumine d’une puretĂ© et d’une sĂ©rĂ©nitĂ© toutes classiques qui deviendront l’une de ses marques de reconnaissance. À cĂŽtĂ© de projets nouveaux (notamment la Messe en RĂ©, opus 86, B. 153), le compositeur se plonge en 1887 dans ses premiĂšres partitions. Il rĂ©vise ainsi son 1er Quatuor Ă  cordes de 1862, encore inconnu du public, et transcrit pour quatuor Ă  cordes douze mĂ©lodies du cycle Les CyprĂšs (B. 11), issu en 1865 de sa passion pour Josefina CermĂĄkovĂĄ – sƓur aĂźnĂ©e de sa future Ă©pouse Anna. DvorĂĄk cherche Ă©galement Ă  retrouver le manuscrit de son Quintette avec piano de 1872 (opus 5, B. 28), l’une des belles rĂ©ussites parmi ses premiĂšres compositions. À l’ami qui en avait suscitĂ© la crĂ©ation, il rĂ©clame une copie du manuscrit, en lui expliquant : « Actuellement, j’aime bien jeter un coup d’Ɠil Ă  mes pĂ©chĂ©s de jeunesse. » DvorĂĄk est lui-mĂȘme surpris de l’invention dont tĂ©moigne l’Ɠuvre, bien qu’il lui trouve certains dĂ©fauts : trop bavarde, imparfaitement structurĂ©e, ronflante parfois. Et la rĂ©vision qu’il lui fait subir ne le contente pas entiĂšrement. Son insatisfaction le conduit Ă  mettre en chantier une Ɠuvre Ă  la formation et Ă  la tonalitĂ© identiques. Entre le 18 aoĂ»t et le 3 octobre, son 2e Quintette avec piano (opus 81, B. 155) voit ainsi le jour – ou comment le rachat d’un « pĂ©chĂ© de jeunesse » donne naissance Ă  l’un des chefs-d’oeuvre de la musique de chambre ! Il est crĂ©Ă© le 6 janvier 1888, par Karel Kovarovic au piano, Karel OndrĂ­cek et Jan PelikĂĄn aux violons, Petr Mares Ă  l’alto, et Alois Neruda au violoncelle, Ă  l’UmeleckĂĄ beseda (l’« Union des artistes ») – une sociĂ©tĂ© Ă  laquelle DvorĂĄk avait pris part depuis sa fondation en 1863. Lors de ce mĂȘme concert, la version pour quatuor Ă  cordes des CyprĂšs (B. 152) ainsi que le 1er Quatuor Ă  cordes (opus 2, B. 8) sont Ă©galement donnĂ©s en premiĂšre audition.

Le Quintette avec piano n°2 (opus 81, B. 155)

I. ALLEGRO MA NON TANTO. Ce mouvement, dont la force et la perfection furent souvent comparĂ©es Ă  celles des Quintettes « La Truite » de Schubert et Ă  l’opus 44 de Schumann, est de forme sonate.

Le premier thĂšme, chantĂ© par un violoncelle lyrique et soutenu par les ondulations soyeuses du piano, saisit d’emblĂ©e l’auditeur (l’écriture rappelle les premiĂšres mesures du Quintette opus 5). Sa courbe est gĂ©nĂ©reuse, noble, qui mĂšne du ton principal La majeur Ă  son homonyme La mineur. En rĂ©ponse, le quintette s’embrase (0’32) et fait traverser des contrĂ©es tonales plus lointaines, dĂ©jĂ . Il semble que ce soit pour mieux ramener le thĂšme initial, au piano (1’23), chaleureusement soutenu par les cordes. Fausse alerte : c’est le violon, dans l’aigu, qui s’en charge (1’37). Comme prĂ©cĂ©demment, le quintette rĂ©plique par un Ă©pisode plus agitĂ© (2’04), qui prend des allures de tarentelle avec ses triolets. Cette transition laisse le second thĂšme du mouvement se dĂ©voiler, plus pathĂ©tique que le premier, en Ut # mineur : Ă  l’alto solo d’abord (2’32), soutenu par les battements angoissĂ©s du piano, puis au violon, accompagnĂ© par tous les autres instruments. Une variation suit (3’03), qui se gonfle de lyrisme ; passage Ă©mouvant mais de courte durĂ©e, contredit par des motifs plus tourmentĂ©s (3’15). À toutes les cordes (3’55), ce second thĂšme reparaĂźt enfin vigoureusement, en pĂ©roraison de cette exposition – entiĂšrement rĂ©pĂ©tĂ©e, conformĂ©ment Ă  la barre de reprise indiquĂ©e par DvorĂĄk. Ouvert par de fantomatiques arpĂšges de piano que n’aurait pas dĂ©savouĂ©s Brahms (8’14), le dĂ©veloppement s’appuie sur le premier thĂšme (8’30) pour colorer les harmonies de modulations expressives, puis sur la version la plus agitĂ©e du deuxiĂšme thĂšme (9’11). Les sections de transition de l’exposition ne sont pas en reste, qui fournissent Ă©galement matiĂšre Ă  variation (9’42). Le discours s’apaise (10’39) et fait reparaĂźtre le premier thĂšme (11’04) Ă  travers un Ă©change entre piano et alto qui monte en intensitĂ©, et porte le thĂšme Ă  incandescence (11’25). ManiĂšre d’appeler la rĂ©exposition (11’41), privĂ©e de l’énoncĂ© initial du premier thĂšme au violoncelle. Est-ce un hasard alors si c’est Ă  ce violoncelle (et non plus Ă  l’alto) qu’est confiĂ© le soin d’entonner le second thĂšme (12’35) – maintenant situĂ© dans le ton de Fa # mineur ? Sauf ces dĂ©tails, le dĂ©roulement de la rĂ©exposition est comparable Ă  celui de l’exposition. Les arpĂšges fantomatiques introduisent un dĂ©veloppement terminal (14’11), qui achĂšve d’exploiter les potentialitĂ©s du second thĂšme, maintenant clamĂ© en un tutti hĂ©roĂŻque (14’26), avant qu’une Coda jubilatoire et presque populaire (14’43) ne referme cette page Ă  la puissance quasi symphonique.

II. DUMKA. ANDANTE CON MOTO. Le mouvement lent du Quintette est de forme Rondo : ABACABA (la section A tenant donc lieu de refrain). Son titre dĂ©finit cette page comme une Dumka : seul le refrain peut en vĂ©ritĂ© prĂ©tendre s’inspirer de cette balade d’origine ukrainienne, nostalgique et proche du rĂ©citatif (on sait que DvorĂĄk en fera Ă©galement usage dans son cĂ©lĂšbre quatriĂšme Trio avec piano, « Dumki », B. 166, opus 90, en 1891).

En ouverture de ce mouvement Ă  la force poĂ©tique et aux contrastes expressifs admirables, la section « A » dĂ©ploie un thĂšme poignant, en Fa # mineur. Son Ă©loquence, ainsi que la sobriĂ©tĂ© de ses accompagnements, suggĂšrent bien un rĂ©citatif stylisĂ©. Le clavier, l’alto, et le violon, s’échangent leurs phrases respectives, serties dans des textures d’une dĂ©licatesse extrĂȘme. L’atmosphĂšre est Ă  l’élĂ©gie, mais aussi Ă  une certaine gravitĂ© – on pense au In modo d’una marcia de l’opus 44 de Schumann. Rarement le piano aura Ă©tĂ© si Ă©conome de ses moyens ; les octaves qu’il Ă©grĂšne en contrepoint du quatuor sont simples mais de toute beautĂ©. Une transition (2’20) mĂšne au RĂ© majeur de la section « B », Un pochettino piĂč mosso : les deux violons se lancent dans un rayonnant duo (2’38), enrobĂ© d’une texture qu’animent posĂ©ment les pizzicati des violoncelle et alto, ainsi que les accords et arpĂšges graves du piano. Un second Ă©pisode en dĂ©coule (3’22), aux textures assez proches, bien que la mĂ©lodie du piano domine. Sans transition, c’est le retour du refrain « A » (4’31). Son dĂ©roulement est presque identique Ă  son premier Ă©noncĂ©, mais les rĂŽles instrumentaux ont Ă©tĂ© intervertis : pour rĂ©sumer, le quatuor chante et le piano ponctue. Bien que de courte durĂ©e, la section centrale « C » vient apporter un contraste salutaire dans ce long mouvement. Soutenues par les pulsations quasi « cardiaques » du piano (6’57), les cordes se lancent une Ă  une dans un Vivace vigoureux et dansant, en Fa # majeur ; Ă  noter que sa thĂ©matique est une spectaculaire mĂ©tamorphose du motif initial du refrain. À la faveur d’une rupture subite (7’38), c’est d’ailleurs une version plus identifiable de ce motif qui vient calmer le jeu et rĂ©introduire la section « A » (7’51). L’écriture en est encore diffĂ©rente : le duo du violon et de l’alto est accompagnĂ© par les arpĂšges descendants du piano et les ponctuations du second violon. Dans la continuitĂ©, la section « B » rĂ©apparaĂźt (9’14), cette fois-ci en Fa # majeur. C’est enfin l’ultime retour du refrain (11’06). Plus attendri que jamais, il prĂ©sente des rĂ©partitions instrumentales encore diffĂ©rentes, puis s’enfonce dans le grave pour refermer ce mouvement.

III. SCHERZO. (FURIANT) MOLTO VIVACE. Le Furiant qu’annonce DvorĂĄk (une danse populaire tchĂšque de caractĂšre vif) doit ĂȘtre pensĂ© comme une valse rapide, dans la lignĂ©e de celles Ă©crites par Schubert (on pourrait aussi Ă©voquer le Scherzando de l’opus 100, bien que moins rapide). L’écriture endiablĂ©e du mouvement de structure tripartite (ABA) fait un parfait contraste avec l’émotion de l’Andante prĂ©cĂ©dent.

Trois Ă©lĂ©ments mĂ©lodiques animent sa premiĂšre section « A ». Le principal est Ă©noncĂ© dĂšs le dĂ©but, au quatuor seul, puis repris instantanĂ©ment au piano : des volutes mĂ©lodiques, alertes et joyeuses, s’élancent dans l’aigu avec insouciance. Le deuxiĂšme Ă©lĂ©ment est un chant d’allure populaire pris par le violoncelle (0’12). Il est complĂ©tĂ© par une variation des volutes (0’21), qui reprennent pleinement leurs droits (0’29). C’est alors le troisiĂšme Ă©lĂ©ment, plus calme, Ă  l’alto (0’42), au second violon (0’56), puis au piano (1’11) ; les volutes ne se privent pas de venir le ponctuer (0’52, 1’07), confĂ©rant son unitĂ© Ă  cette mosaĂŻque thĂ©matique. Ce sont elles qui concluent avec panache la premiĂšre section du mouvement (1’21). Les accords d’un choral berceur installent le climat apaisĂ© de la partie centrale « B » (1’43). Alanguies, les volutes sont reprises Ă  l’alto (1’52), au violon (2’08), puis au piano (2’12). Sur les harmonies du « choral », c’est un nouvel air qui fait son apparition, Ă  l’alto d’abord (2’32), puis en octave aux violons (2’49). Les volutes reparaissent et dialoguent avec le choral (3’04). Une accĂ©lĂ©ration ramĂšne la premiĂšre section « A », privĂ©e maintenant de son troisiĂšme Ă©lĂ©ment mĂ©lodique.

IV. FINALE. ALLEGRO. L’exubĂ©rant dernier mouvement du Quintette de DvorĂĄk est structurĂ© comme une sonate en rondo. Autrement dit, et pour tenter de faire simple, les deux thĂšmes d’une habituelle « forme sonate » sont agencĂ©s pour donner l’impression d’une alternance entre des Ă©pisodes caractĂ©risĂ©s, et un refrain. L’ensemble s’inscrit dans la rhĂ©torique, bien connue, qui consiste Ă  donner le second thĂšme dans le ton principal lors de la rĂ©exposition, tandis que l’exposition l’avait Ă©noncĂ© Ă  la dominante. VoilĂ  pour la thĂ©orie. La pratique est Ă  la fois plus rĂ©jouissante et plus complexe encore. Comment dĂ©crire en effet l’incroyable invention dont fait preuve DvorĂĄk au long de ce Finale ? Balisons le discours de ses principaux Ă©lĂ©ments.

AprĂšs une introduction, le premier thĂšme est entonnĂ© par le premier violon (0’11), en La majeur ; il est virtuose et dansant (certains commentateurs le comparent Ă  une polka), dĂ©jĂ  dĂ©veloppĂ©, plusieurs fois repris, et mĂȘlĂ© au motif de l’introduction. AprĂšs une transition qui fait la part belle aux traits pianistiques (0’43), c’est encore le premier violon qui se charge du second thĂšme, donnĂ© en Mi majeur. Plusieurs Ă©pisodes le constituent : une phrase piquante et accentuĂ©e (1’18), une autre phrase magnifiquement lyrique (1’31), un Ă©lĂ©ment de ponctuation Ă©trange et doucereux (1’40), un passage baignĂ© de syncopes (1’56), l’élĂ©ment de ponctuation Ă  nouveau (2’08). L’introduction fait son retour (2’28), et convoque le premier thĂšme Ă  sa suite (2’39) – dĂ©but du dĂ©veloppement selon la « forme sonate », retour du refrain selon le « rondo ». MĂȘlĂ© au motif de l’introduction (2’48), il donne lieu Ă  de multiples dĂ©veloppements, oĂč la virtuositĂ© le dispute Ă  la variĂ©tĂ© des climats. La mĂ©canique ralentit (3’35), un rideau troublĂ© de mystĂšre paraĂźt (3’35), qui se lĂšve sur un formidable fugato (3’39) : les instruments tour Ă  tour entonnent le premier thĂšme. La tension est Ă  son comble (4’16), il s’agit maintenant de la faire redescendre sans perdre en intensitĂ©. Le premier thĂšme revient sur une note pĂ©dale au violoncelle (4’20), puis un choral se fait entendre (4’37), curieux moment de recueillement, invention spectrale et superbe au beau milieu de cette apothĂ©ose de la danse. Encore quelques bribes du premier thĂšme (4’42), murmure de trilles, et c’est le deuxiĂšme thĂšme qui revient (4’59), constituĂ© de ses divers Ă©pisodes, maintenant Ă©noncĂ©s dans le ton de La majeur. Le mystĂ©rieux choral reparaĂźt, et prĂ©dit la fin du mouvement. Solennelle et apaisĂ©e ? C’eĂ»t Ă©tĂ© sans compter sur le turbulent premier thĂšme, qui s’assagit d’abord au voisinage du choral, mais finit par retrouver sa fiertĂ©.

Nicolas Southon

La presse en parle

Le Monde de la Musique, December 2006, Patrick Szersnovicz


« AprĂšs avoir Ă©crit en 1872 un Premier Quintette pour piano et cordes en la majeur dont il Ă©tait lui-mĂȘme déçu, DvorĂĄk compose en 1887 son Quintette en la op.81. Cette partition, l’une de ses meilleures, reflĂšte un optimisme unique dans ce rĂ©pertoire. Belle autant que fragile, l’Ɠuvre ne peut tout Ă  fait ĂȘtre comparĂ©e aux plus grands quintettes pour piano et cordes (Schumann, Brahms, Franck, FaurĂ©, Schmitt, Chostakovitch), mais elle a atteint le mĂȘme degrĂ© de cĂ©lĂ©britĂ© ; elle doit quelque peu Ă  Schubert et Ă  Schumann et beaucoup Ă  Brahms, quoique ses inflexions slaves n’appartiennent qu’à leur auteur. ProjetĂ© avant le 13e Quatuor mais achevĂ© aprĂšs lui, le 14e Quatuor (1895) est l’ultime partition de chambre de DvorĂĄk. Bien que construite en quatre mouvements, l’Ɠuvre revient Ă  l’ordre prĂ©classique, prĂ©sentant le scherzo en seconde position. ParticuliĂšrement dĂ©veloppĂ©, le rondo-sonate final dĂ©bute au registre le plus grave du violoncelle avant de proposer comme un trop-plein d’allĂ©gresse. LaurĂ©ates du Premier Grand Prix du Concours international de Bordeaux en 2001, les jeunes musiciennes du Quatuor Psophos mĂšnent le 14e Quatuor avec un geste large, imposant un discours libre et prĂ©cis, fait d’inflexions mĂ©lancoliques et d’emportements soudains. La cohĂ©sion de l’ensemble est exemplaire, assez Ă©loignĂ©e des accents tchĂšques, mais gardant lĂ©gĂšretĂ© et transparence. La collaboration avec la jeune pianiste d’origine roumaine Dana Ciocarlie produit une interprĂ©tation du Quintette op.81 remarquable de nostalgie et d’équilibre. Â»

CD réalisé avec le soutien de Mécenat Musical Société Générale

 

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